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Carillons de France
Carillons de France
14 septembre 2008

Dunkerque (Nord)

Campanile de l'église Saint-Eloi
inscrit par l'UNESCO au Patrimoine mondial de l'humanité le 15 juillet 2005
48 cloches - 16.375 kg
carillon manuel + ritournelles automatiques

dunkerque1Selon la légende, Saint-Éloi, évêque de Tournai et de Noyon et conseiller particulier du roi Dagobert Ier, serait venu, au VIIe siècle, visiter Dunkerque, ou plutôt les maisonnettes éparses établies dans les dunes par les pêcheurs. Pleins de reconnaissance pour Saint-Éloi, leur père spirituel, les habitants érigèrent bientôt, en son honneur, une petite chapelle qu'on désigna par la suite, suivant la tradition, sous l'appellation de Duynekerke, l'église des dunes. La légende est belle mais Saint-Éloi n'a pu fouler le sol de Dunkerque alors submergé à la suite de l'invasion marine du IIIe siècle. Exposés aux attaques des barbares, le hameau et la chapelle furent plus d'une fois ruinés, rétablis, renversés de nouveau. Par suite de ces vicissitudes, l'église n'avait plus rien de son apparence primitive. Il en fut de même pour le hameau qui diminuait peu à peu et devint un simple faubourg de la ville de Dunkerque où une nouvelle église avait été bâtie. La Tour elle-même - en effet jamais un Dunkerquois ne se servira d'un autre mot pour désigner ce monument - a sans doute été érigée vers 1450 pour servir de clocher à l'église Saint-Eloi mais aucun document ne permet de confirmer ou démentir l'hypothèse de sa construction sur une tour de guet édifiée au XIIIe siècle. Haute de 58 mètres, entièrement construite en briques dans le style gothique, cette tour présente un carré parfait. Elle est couronnée par une plate-forme ceinturée d’une balustrade avec une tourelle à chaque angle. Au centre de la plate-forme supérieure se trouvait, jusqu’en 1940, la logette du guetteur surmontée d'un mât de pavillon haut de 16 mètres, coiffé d'un coq doré mesurant 1,80 mètre du bec à la queue.

L'histoire du carillon de Dunkerque ne se résume pas à ces trente dernières années. Comme malheureusement pour tout ce qui se rattache à la tour, l'origine de ce carillon se perd dans la nuit des temps et aucun document ne permet de déterminer l'époque à laquelle il fit tinter pour la première fois ses " cloches argentines ". D'après les historiens Faulconnier & Bouchet, le beffroi et son jeu de cloches, symboles des libertés communales, seraient contemporains de l'Hôtel de Ville dont l'évêque de Cambrai, Godefroy de Condé, dota la cité en 1233. Il serait ainsi contemporain du plus ancien carillon connu, celui de Bruges, dont on retrouve trace dans les comptes municipaux à partir de 1298. Les premiers renseignements précis sur le carillon du beffroi remontent au XVe siècle. Il y avait alors, en 1476, un si habile carillonneur à Dunkerque "qu'on venait de fort loin pour admirer son adresse à marquer agréablement toutes sortes d'airs par le carillon des cloches". Cette même année, la commune paye des gages à un carillonneur nommé Jan van Bevere. Au XVIe siècle, le magistrat de Dunkerque, pour satisfaire l'engouement général, créa un second carillon qui fut placé dans la tour de justice sur le port, à proximité du Leughenaer. Ce carillon disparut avec la tour qui l'abritait. En 1558, les cloches du beffroi furent mises en pièces par les soldats du maréchal de Termes qui en emportèrent les débris à Bergues. Ils voulaient ainsi supprimer les moyens de sonner l'alarme. En 1561, Jean Huwyn, habile fondeur de Saint-Omer, en coule 6 nouvelles pesant ensemble 2.840 livres installées par Victor Nelis, horloger à Gand, avec une horloge à deux cadrans sur la tour. Cornil de Weghe, forgeron, réalise des battants et attaches de fer. Ces cloches furent à nouveau détruites dans les années qui suivirent, cette fois par les Huguenots. En 1634, Mr Trouffinberge, " faiseur d'horloge ", ajoute deux cadrans à la tour pendant qu'on installait de nouvelles cloches. Lorsque le carillon ou l'horloge étaient hors service, on les réparait. De tout temps, on voit le magistrat consacrer à l'entretien du carillon ou à ses réparations des sommes relativement importantes. On peut le constater dans presque tous les registres de comptes de ville qui ont échappé à la destruction. Au moment de la Révolution, le carillon chantait toujours jusqu'à ce que les plus grosses cloches soient descendues du beffroi, livrées au fondeur, transformées en canons ou en gros sous. Le carillon fut alors réduit au silence jusqu'en 1826, époque à laquelle, suite aux plaintes des Dunkerquois, l'administration municipale s'adresse à Cavilliers, fondeur à Carrepuis. Les cloches de l'ancien carillon, pourtant excellentes, furent refondues et on en adjoignit de nouvelles. On fit appel à Joseph Lepaute, horloger du roi et de la ville de Paris, pour la construction de la nouvelle horloge et l'installation du carillon. Malheureusement ces cloches étaient de mauvaise qualité sonore et le mécanisme trop fragile. Des cloches durent être refondues mais ne donnèrent pas de meilleur résultat. Aussi, en 1845, à la suite des fêtes inaugurales de la statue de Jean Bart où le carillon ne répondit pas à sa réputation, il cessa de chanter. Il en eût peut-être été longtemps ainsi si Gaspard Malo, en 1853, désolé de ce morne silence, n'eut généreusement offert au conseil municipal de pourvoir à ses frais, à la réfection du carillon, en y consacrant le montant de son indemnité de représentant du peuple. La réfection coûta plus de 16.000 francs à Gaspard Malo. On fit appel à Van Aerschodt, fondeur à Louvain (successeur d'André Van den Gheyn) pour fondre les cloches qui seront détruites dans l'immense brasier qui consuma le beffroi en 1940 et dont seules quelques rescapées sont conservées au musée de la ville. La renommée du carillon de Dunkerque, est perpétuée par une vieille chanson qui fut dansée à la cour des rois de France et est restée un des thèmes du célèbre chahut du carnaval dunkerquois. Comme l'indique une affichette découverte dans la guérite en 1824, la profession de guetteur, appelé "tourier", fut assurée pendant plus de six cents ans (de 1234 à 1886) de père en fils par la famille Garcia, originaire d'Espagne. Le guetteur veillait jour et nuit dans sa guérite, donnait l'alerte en cas de danger (le tocsin), signalait les sinistres en plaçant sur le rebord la tour un fanal qui en indiquait la direction, communiquait par signaux et fanal avec les bateaux en rade de Dunkerque, soulignait les fêtes en hissant le grand drapeau de 12 mètres et la flamme tricolore de 35 mètres, "à mi-mât si c'est tristesse, tout en haut si c'est joie" ou encore pour le "grand pavois", tendait d'immenses cordages chargés de pavillons multicolores. Comme il ne lui est pas permis de se laisser aller au sommeil, dans le jour chaque fois que tinte la sonnerie de l'horloge, il doit y répondre en mettant en mouvement le battant d'une cloche au moyen d'une corde qui monte jusqu'à la logette : il donne deux coups à l'heure et un coup à la demie ; c'est ce que les Dunkerquois appellent le "coup de rebond". En revanche le guetteur sonnait aussi, à chaque heure de la nuit, un coup de trompe annonçant qu'il veillait. L'instrument en place aujourd'hui est constitué de 48 cloches fondues en 1962 par Alfred Paccard. Avec le bourdon sol (5.000 kg), les trois autres basses, do (2.500 kg), ré (1.500 kg) et mi (1.000 kg), peuvent être actionnées à la volée pour les offices de l'église Saint-Éloi. La bénédiction des cloches a eu lieu le 6 mai 1962, et l'inauguration le 26 août de la même année. Le clavier est astucieusement situé entre les quatre bourdons et le bâti métallique porteur du reste des cloches, occupant harmonieusement l'immense chambre des cloches. Le gros cylindre traditionnel de bronze avec taquets qui, avant 1940, à chaque quart d'heure, actionnait mécaniquement les battants extérieurs, a été remplacé par de petits rouleaux de bakélite dont les perforations déclenchent électriquement des moteurs qui tirent des battants intérieurs.
Après de nombreuses années de silence, le carillon a retrouvé sa voix, après à une restauration complète, à l'occasion des "Journées du patrimoine" 2009.

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